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On observe que, sans pour autant renier le champ où la pratique a vu le jour, et encouragés par les nécessités des mutations sociales, techniques ou politiques, un nombre croissant de designers et de jeunes chercheu·ses·rs en design se projettent sur des terrains où la forme plastique, telle qu'elle a constitué le fonds des premières générations, n'est plus pleinement opérante ou pertinente, ni forcément requise. C'est le cas notamment dans le champ du design social, dans certaines formes de design militant - par exemple autour des questions de genre, de l'anti-racisme, de l'anti-spécisme, de l'écologie, de la condition des réfugiés, de la citoyenneté, de la critique des dérives de la finance et du néo-libéralisme ; dans le design des politiques publiques et des instances de représentation, dans le design numérique... Cette extension tous azimuts des limites du domaine de compétence et de performance du designer a une incidence i) sur les médiums et outils mobilisés par ce nouveau type de designers ; ii) sur les conditions d'acquisition de la compétence elle-même et sur le design comme « discipline » ; iii) sur le niveau de reconnaissance du design comme pratique experte ; iv) sur la manière qu'ont les designers eux-mêmes de se représenter leur pouvoir de transformer le monde et sur l'ambition dévolue à la pratique du design ; v) incidence enfin sur l'existence même du design comme domaine, dont on peut se demander aujourd'hui s'il a encore des limites. De ce constat dérive une série de questions que la journée d'étude de l'UR Design et création de l'ESAD Saint-Étienne se propose d'examiner :
Que devient l'horizon d'un monde plus habitable quand s'effacent le souci plastique et le recours au sensible ? Que devient la·le designer quand elle·il est privé·e de son expertise en matière de forme ou quand son activité aboutit à d'autres types de formes ? Peut-on faire l'hypothèse d'un déplacement de la création du champ de l'art vers un ou d'autre·s champ·s (technologie, innovation sociale, écologie, économie, politique, etc.) ? Ce déplacement condamne-t-il le designer à l'errance ? Pour les designers, la création artistique doit-elle être tenue pour le modèle (unique) à partir duquel interroger les autres formes (politiques, éthiques, sociales, techniques, etc.) ou doit-elle simplement figurer parmi les autres et au même titre qu'elles ? Et par suite, en tant qu'elle favorise en premier lieu la forme, l'école d'art incarne-t-elle encore un lieu fécond où peuvent s'imaginer pour le design les pratiques de création de demain ? L'école d'art favorise-t-elle ces extensions du domaine du design ou les empêche-t-elle ? Devons-nous inventer une école de design où le politiste, le philosophe, l'ethnologue, le linguiste, l'ingénieur, le médecin, etc., occuperaient une place aussi légitime que celle du sculpteur, du peintre et de l'historien de l'art ?
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It is observed that, without renouncing the field in which the practice came into being, and encouraged by the necessities of social, technical or political change, a growing number of designers and young researchers in design are projecting on lands where the plastic form, as it constituted the fund of the first generations, is no longer fully operative or relevant, nor necessarily required. This is particularly the case in the field of social design, in certain forms of militant design - for example, around gender issues, anti-racism, anti-speciesism, ecology, the refugees, citizenship, criticism of the excesses of finance and neo-liberalism; in the design of public policies and representation bodies, in digital design ... This all-out extension of the limits of the designer's field of competence and performance has an impact on i) the mediums and tools mobilized by this new type of designers; (ii) on the conditions of acquisition of the competence itself and on design as a "discipline"; iii) the level of design recognition as an expert practice; (iv) how designers themselves view their power to transform the world and the ambition of the practice of design; and (v) finally, the very existence of design as a domain, which we can wonder today if it still has limits. From this observation comes a series of questions that the study day of the UR Design and creation of the ESAD Saint-Etienne proposes to examine:
What becomes of the horizon of a more habitable world when the plastic and the recourse to the sensible disappear? What happens to the designer when she is deprived of her expertise in form or when her activity leads to other types of forms? Can we hypothesize a shift from the creation of the field of art to one or other fields (technology, social innovation, ecology, economics, politics, etc.)? Does this displacement condemn the designer to wander? For designers, should artistic creation be held for the (unique) model from which to question other forms (political, ethical, social, technical, etc.) or should it simply be among the others and in the same way they? And as a result, inasmuch as it primarily favors form, does the art school still embody a fertile place where the creative practices of tomorrow can be imagined for design? Does the art school promote these extensions of the design field or prevent them? Should we invent a school of design where the political scientist, the philosopher, the ethnologist, the linguist, the engineer, the doctor, etc., occupy a place as legitimate as that of the sculptor, the painter and the historian of art ?
When
Location
- L'Unité de Recherche Design et création de l’ESAD Saint-Étienne, Saint-Etienne, France